Il cartonne sur les plateformes de streaming et les réseaux sociaux. Alors que le Vatican vient d’annoncer, lundi 28 avril, que le conclave s’ouvrirait mercredi 7 mai, Conclave, film d’Edward Berger sorti en décembre 2024, connaît ces derniers jours un regain de popularité. Après presque 1,2 million d’entrées en France, son visionnage en ligne a augmenté de 283 % à la mort du pape François, selon le média spécialisé Variety.
Basé sur le roman éponyme de Robert Harris, ce long métrage oscarisé suit à la manière d’un thriller le cardinal fictif Lawrence, incarné par Ralph Fiennes, chargé d’organiser l’élection du prochain pape. Décrit-il de manière aussi réaliste qu’il en a l’air ces moments historiques ?
La chambre du pape défunt est-elle mise sous scellés ?
Au début du long-métrage, la chambre du pape défunt est mise sous scellés. Dans la réalité, la même scène s’est en effet déroulée à la mort de François. Selon Vatican News, des « scellés ont alors été apposés sur les portes de l’appartement papal au troisième étage du Palais apostolique », la résidence officielle de la papauté, et « également sur la porte de l’appartement au deuxième étage de la Maison Sainte-Marthe » où l’évêque de Rome habitait. Cette tradition, ancienne, est symbolique et représente un cycle qui s’achève. Dans le film comme dans les faits, l’anneau du pêcheur (en latin anulus piscatoris), symbole du lien direct du pape avec sa fonction de successeur de saint Pierre, est également brisé pour empêcher toute tentative de falsification de documents par usurpation du sceau du défunt.
Un cardinal inconnu peut-il participer au conclave ?
Dans cette fiction, un cardinal, inconnu de ses confrères car nommé secrètement par le pape défunt, provoque la surprise en arrivant au Vatican pour participer au conclave. Cette procédure, qui remonte au XVe siècle, existe bel et bien : il s’agit d’une nomination in pectore, qui signifie en latin « dans le secret du cœur (du pape) ». L’objectif ? Protéger ces hommes d’Église des risques de persécutions dans le pays où ils résident, ce qui est le cas de ce personnage fictif, le cardinal Benitez, qui réside à Kaboul, en Afghanistan.
En pleine guerre froide, Jean-Paul II avait fait un usage stratégique de cette prérogative. Il avait nommé en 1979 Ignatius Kung Pin-mei (Chine) puis en 1998 Marian Jaworski (Ukraine) et Janis Pujats (Lettonie) cardinaux in pectore, pour leur éviter la répression des régimes communistes alors en place.
Cependant, pour participer à un conclave, un cardinal doit en réalité avoir été créé lors d’un consistoire, ce qui n’a pas été le cas du personnage du cardinal Benitez, qui ne dispose que d’une « lettre de nomination » signée par le défunt pape.
Des technologies sont-elles utilisées pour isoler les cardinaux ?
Le conclave est un mot dérivé du latin cum clave (« avec une clé »), autrement dit « fermé à clé ». Dans le long métrage, deux dispositions drastiques sont prises pour éviter que les cardinaux soient espionnés ou fassent fuiter des informations à l’extérieur : des « brouilleurs électroniques » et des panneaux sur les vitres de la chapelle, pour éviter que des curieux « utilisent des lasers pour lire les vibrations des vitres » et tentent d’écouter ce qui s’y dit.
Lors du conclave de 2013, un système de brouillage avait bel et bien été mis en place pour rendre téléphones ou tablettes inopérants. Si les fenêtres de la chapelle Sixtine n’étaient pas couvertes, celles des chambres des cardinaux à la Maison Sainte-Marthe avaient été condamnées. Dès le conclave de 2005, la crainte d’une utilisation extérieure de microlasers existait également, comme en témoigne un article de l’époque du média américain NBC.
L’Église est-elle scindée entre progressistes et conservateurs ?
Conclave met en avant plusieurs personnages aux tendances très marquées, comme les cardinaux Aldo Bellini (Stanley Tucci), progressiste, Goffredo Tedesco (Sergio Castellitto), qui représente l’aile davantage traditionaliste, ou encore Joshua Adeyemi (Lucian Msamati), un conservateur, présenté comme favori.
Le film caricature ainsi la situation en présentant le Collège des cardinaux comme un champ de bataille entre factions « libérales » et « conservatrices », mais la réalité est beaucoup plus complexe. Surtout, un pape ne peut être élu sans une majorité des deux tiers des cardinaux électeurs, ce qui favorise un résultat par consensus.
Quid de la fin ? Attention, spoiler !
Ici Mission conclave prend le relais de La Croix : à la fin, le candidat élu est… intersexe (personne dont des caractéristiques sexuelles – chromosomes, hormones, organes génitaux – qui ne correspondent pas aux définitions types des corps féminins ou masculins).